Projet en scratch sur base T-55 Esci
Modèle, figurines et textes par Zacharius Sex, peinture par David Coynes et
Zacharius Sex
Ce montage a fait l'objet d'une publication partielle dans le numéro 90 de Steelmasters
De nombreux chars n’ont
jamais connu la consécration qu’ils méritaient et alors que le T-55 est devenu
synonyme de la conception des chars soviétiques d’après-guerre, une large gamme
de variantes sont restées pratiquement inconnues.
Par exemple, l’automoteur soudanais Abu-Fatima et le M-1978 Kochsan nord coréen
sont relativement peu connus en raison de leur particularisme local exotique et
de la tendance de leurs propriétaires à fuir les objectifs photographiques.
Cependant, les principales
Cendrillons de la famille T-55 sont les versions de dépannage et de génie,
formant un ensemble de véhicules qui, jusqu’à récemment, attendaient patiemment
le moment de surgir de l’ombre à la lumière du soleil.
Alors que le dernier manuel de photos de “Wings and Wheels” consacré aux
versions de dépannage du T-55 laisse peu d’excuse au maquettiste qui veut
s’attaquer aux BTS-2, BTS-3, WZT ou MT-55, il est un peu plus délicat de mettre
la main sur des informations à propos du véhicule de combat du génie russe IMR.
Heureusement, depuis la
fin de la Guerre froide, de nombreux auteurs russes ont publiés ouvrages et
revues commençant à combler les trous du gigantesque puzzle que constituent le
développement et la production des véhicules blindés russes.
Un de ces auteurs est M. Baryatinsky dont le livre « Chars en Tchétchénie »
fournit au lecteur une myriade de photographies d’ambiance du matériel russe,
non seulement en Tchétchénie mais également sur tout le territoire de l’ex-URSS.
Dans cette « débauche » d’images, on trouve deux photographies du chimérique objekt 616A - ou véhicule de combat du génie IMR – en train de creuser son chemin dans une montagne d’Ossétie du Sud. Ces deux images fournissent plein de détails visuels et furent la source d’inspiration de ce projet.
Après avoir conversé avec Aaron Smith profitant de sa connaissance étendue des véhicules russes et de ses extraordinaires capacités en scratch, j’ai décidé de m’essayer sur l’IMR.
La première étape fut de créer une sorte de gabarit ou de plan à l’échelle à partir duquel travailler. Ceci fut grandement facilité par une série de photos d’un IMR de l’IFOR en Bosnie, sur le site armyrecognition.com.
La planification initiale de ce projet prévoyait 5 étapes, la première étant la tourelle centrale et le bras de la flèche. La seconde concernait la lame réglable. La troisième se concentrait sur la pince à grumes à l’arrière de la flèche. La quatrième étape était consacrée à la fabrication des réservoirs de carburant latéraux, des coffres latéraux, du poste de pilotage et du compartiment moteur. La cinquième et dernière séquence s’attachait aux figurines et à divers attirails. Ceci négligeait l’ensemble des durites et flexibles hydrauliques ainsi que d’autres équipements variés, détails supplémentaires que j’avais négligés de prévoir dans mon plan de travail.
En conséquence, l’ensemble
du projet pris beaucoup plus de temps et devint tellement absorbant qu’à
certaines occasions l’IMR fut mis de côté pour faire reposer mon esprit.
Rétrospectivement, l’IMR devint une sorte de monstre avec son abondance de
conduites hydrauliques, de vitres et sa myriade d’équipements minuscules.
Etape 1: la tourelle centrale et la flèche.
Cette première étape concernait la mise en forme de la tourelle blindée de l’opérateur de la flèche. La tourelle est elle-même d’une forme assez simple, reposant du côté gauche sur une base circulaire. Le côté droit est marqué par le vérin de la flèche et diverses conduites hydrauliques. Sur ce modèle, tout cet équipement délicat est exposé. Sur les modèles d’IMR suivants, comme l’IMR-2 basé sur le T-72, cette masse de conduites hydrauliques est protégé par un tambour blindé.
J’ai construit les côtés de la tourelle de l’opérateur de la flèche en chauffant des fûts de carburant de T-55 Trumpeter puis en les collant à des sections plates représentant les faces avant et arrière de ce tourelleau blindé. La phase suivante a été de couvrir celui-ci avec une feuille de carte plastique. Ensuite, en utilisant une Dremel, j’ai percé les ouvertures pour les hublots et la trappe. La finition de ce travail a été faite à l’aide de limes de bijoutier, de lames chirurgicales et de papier abrasif finement enroulé.
Un procédé similaire a été employé pour le tourelleau blindé du pilote. De manière intéressante, la tourelle et le poste pilote disposent de la même trappe. Celles-ci furent faites en adaptant deux trappes en surplus du MT-LB Skif.
Pour revenir à la tourelle, la large jointure coudée à l’arrière fut sculptée dans divers morceaux de chute plastique et fixée au grand bras triangulaire de la flèche.
La flèche est une structure assez simple avec plusieurs coffres et logements disposés le long de son côté droit.
La structure de la flèche finit dépassant l’arrière du véhicule avec une articulation renforcée à 5 faces sur laquelle est suspendue la pince à grumes. Le logement de cette articulation s’est révélé un petit projet tout simple pour mettre un point final agréable à cette séquence.
Etape 2 : la lame de déblaiement réglable
Cette étape s’articule autour d’une lame de déblaiement et d’un mécanisme complexes fixés à l’avant de l’engin. Dans la réalité, la lame est réglable et peut être ajustée selon de nombreuses utilisations comprenant le déneigement, la construction de route et le décapage de surfaces.
Je fus accroché par une photo dans « Chars en Tchétchénie » sur laquelle la lame est pivotée sur la droite et pousse des gravats hors d’un chemin de montagne.
La construction de cette lame, qui est en fait constituée de deux lames jointes, a été le pivot de cette phase essentielle du projet.
Je me suis décidé pour utiliser des lamelles en aluminium de canettes de bière collées à la cyanolite sur des bandes de plastique de pots de yaourts. Les lames ainsi construites furent fixées à un pivot en forme de coin lui-même fixé à l’avant de l’engin par de gros bras de poussée. La lame est actionnée par 6 vérins hydrauliques fabriqués à partir de morceaux de canon du T-72 Dragon pour l’enveloppe extérieure et de morceaux de grappe ronds pour le piston intérieur.
Étape 3: la pince à grumes
La troisième composante était la pince à grumes qui est suspendue au bout du bras de levage de l’IMR. Elle est capable de soulever des troncs d'arbres et d’autres obstacles, et sa portée peut être étendue en raison de la nature du bras télescopique. La pince s’est avérée assez simple à monter étant assez semblable à celle trouvée sur les camions grumiers.
Lorsque la pince n'est pas utilisée, le bras reçoit un godet, attaché à sa face interne, vraisemblablement pour scarifier et calibrer les sols.
A gauche de la pince est fixé un étrange équipement à deux jambes dont le haut a une forme de bêche et qui semble réglable et capable de mouvement vertical grâce à un vérin hydraulique.
Étape 4: les réservoirs à carburant latéraux, coffres latéraux, poste de pilotage et la baie moteur.
Cette étape consistait à construire le grand réservoir à droite et les coffres de rangement à gauche. Ceux-ci sont installés sur les « ailes » du T-55.
Le grand réservoir à droite est détaillé avec des bandes métalliques anti-dérapantes et des capuchons de réservoirs. Ces détails ont été fabriqués avec des bandes ultra minces découpées dans du carton de couvercle de yaourts.
Les coffres de rangement sur le côté gauche ont de grands couvercles rectangulaires construits en utilisant des sections de trappes de T-72 Dragon. Un tiers de la largeur de chaque trappe a été enlevé et les deux autres ont été ensuite collés ensemble pour constituer les couvercles plus grands qui étaient nécessaires.
A l'arrière du véhicule que j'ai décidé d'ouvrir la plage moteur après avoir vu quelques séquences « You Tube » montrant un BTS-3 irakien entrer dans une ville iranienne pendant la guerre Iran-Irak dont le panneau moteur rebondissait alors qu’il progressait sur un terrain accidenté.
Ce détail supplémentaire cadrerait avec la composition encombrée de ce modèle particulier. Après tout, un IMR mis à rude épreuve et dont le moteur surchauffe pourrait bien avoir ses grilles moteur entrouvertes par un membre d'équipage soucieux du matériel.
Étape 5: Production de plusieurs personnages et d’équipement divers.
Cette étape finale du projet impliquait de sculpter une série de figurines qui consistait en deux membres d'équipage et deux soldats russes. Ceux-ci ont été ajoutés pour donner une idée de l'échelle du projet mais également apporter cette touche d’humanité qui complète la scène et donne à l’ensemble une impression de réalisme.
Les figurines elles-mêmes étaient une combinaison de figurines russes de la 2e GM Mini-art et modernes de chez Dragon. Elles furent recomposées pour ressembler à des soldats russes modernes tels que déployés en Tchétchénie.
En combinant les parties inférieures des figurines Mini-art avec le torse des Dragon je crois avoir réalisé une figurine ayant l’air réaliste et reflétant l'aspect des troupes russes modernes.
Pour couronner les têtes, j'ai utilisés des têtes Hornet pour les fantassins, mais dans un souci d'originalité, pour l'équipage, j'ai combiné des visages de têtes Hornet avec des casques d'équipage de char russe en plastique. J'ai construit les têtes de l'équipage de cette façon pour créer un ensemble plus diversifié de figurines étant donné que Hornet ne produit qu’une variété limitée de têtes d'équipage de char, que j'ai déjà toutes utilisées sur une variété de projets.
L'étape finale a été l'ajout de deux coffres de rangement sur les trappes d'accès au moteur à l'arrière du véhicule dont le premier était un simple coffre fermé avec une poignée construit à partir de chutes de plastique. Le second est un coffre ouvert, également construit à partir de plastique de récupération dans lequel j'ai mis un bidon d’huile rouillé et abîmé, une paire de vieilles bottes, une masse, un tuyau à carburant enroulé, le tout recouvert d’une toile cirée.
J'ai ensuite fait passer le modèle à David Coynes pour la mise en peinture.
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Étape 6: La peinture du modèle et la création de la base.
Après avoir
récupéré l’IMR des mains de Zack, j'ai été frappé par son aspect trapu et
robuste.
La première
chose que j'ai faite a été de masquer
les six hublots de la tourelle avec du Maskol puis j'ai vaporisé tout le
véhicule avec un
brun foncé soutenu.
Cette couche recouvrit la multitude de couleurs de plastiques différents et
servit de d’apprêt pour le camouflage trois tons sur lequel nous nous étions mis
d’accord Zack et moi.
Le schéma de
camouflage présentait plus qu'une simple
ressemblance avec celui de l'OTAN que l’on trouve sur les Léopards allemands et
divers autres véhicules de l'OTAN.
J'ai utilisé du vert moyen 120 Humbrol et composé les autres couleurs
en utilisant du brun 84 et gris-noir 9
Revell, je trouve que les couleurs Revell sont super pour la pulvérisation, mais
également
vraiment bien pour le pinceau. Le travail à
l’aérographe terminé, j'ai appliqué un mélange de boue sur la coque inférieure
et innocemment présumé que Zack se
contenterait de salir et vieillir le véhicule. Mais comme nous le verrons, Zack
a changé d’idée.
J'ai également
convaincu Zack qu’un gros véhicule comme l’IMR aurait besoin d'une base
appropriée.
Après
une longue réflexion nous avons
ébauché avec quelques esquisses d'une route vallonnée en pente avec l’IMR
dégageant un éboulement de décombres avec sa lame dozer inclinée.
Elle a été construite avec une base de mousse de polystyrène, un pourtour en
lames de bois, des rochers en plâtre coulé et divers accessoires pour dioramas.
J'étais
assez satisfait du résultat auquel
j'étais parvenu.
Retour à Zack ...
Dave a donné au modèle une finition professionnelle comme sortie d’usine et très plaisante. Ce fut désormais à mon tour de vieillir cette bête disgracieuse. J'ai commencé sur une petite zone d'essai avec un jus de terre d'ombre naturelle, quelques éclats de peinture. Une fois satisfait de l'effet obtenu, je le reproduisis sur l'ensemble du modèle en ajoutant les taches d'huile et d'usure.
J'ai aussi ajouté mon effet personnel favori emprunté aux pointillistes, qui consiste en l'application de points de peinture acrylique similaire à la couleur principale, mais de ton plus léger, plus chaud ou plus froid. Ceci est obtenu en ajoutant de petites quantités de blanc, jaune ou bleu à la couleur de base d'origine. L'effet sur l'œil est semblable à celui de la pixellisation.
Alors que l’IMR progressait très bien à ce stade, deux choses m'ont amené à réévaluer complètement le projet dans son ensemble: d'une part, l’IMR semblait étrangement familier dans son nouveau schéma de camouflage et en le comparant au BTS3 (publié dans le numéro 37 d’AFV), j'ai réalisé que nous avions en effet presque reproduit à l’identique le schéma de camouflage et le vieillissement de cet autre projet particulier. Il n’était pas question de l’envisager, car si elle était basée sur un véritable schéma de camouflage pour l’IFOR en Bosnie, je voulais que l’IMR ait une apparence unique qui, par son essence même, donne l'air de russe moderne.
Deuxièmement, plus tard ce jour-là je vis le numéro 40 d’AFV. Comme toujours source d’inspiration, ce numéro comportait un article majeur par Mig et Adam Wilder. J'étais frappé par l'affirmation de Mig que le modélisme était devenu stéréotypé et sans risque, tandis qu'Adam guidait le lecteur en différentes séquences pour le montage de son dernier Panzer en utilisant les travaux des anciens maîtres comme un source d'inspiration pour réaliser un Panther F avec la technique de la modulation. Inspiré par l'article et mis au défi par les commentaires de Mig, je décidai qu'un changement de direction en ce qui concerne le choix des couleurs devait être opéré.
Heureusement,
la multitude de schémas de camouflages appliqués plus récemment par l'armée
russe a donné au maquettiste une grande latitude de choix. Après avoir fouiné
parmi les images sur Internet, des albums et des magazines,
j'ai décidé de modifier le schéma de
camouflage rouge brun vers soit un jaune pâle soit un gris pâle. Après quelques
tests, je me suis décidé pour un gris
qui démarra en bleu puis suite à un long processus d’expérimentation finit en un
gris pâle que j'avais vu sur un MAZ russe et un dépanneur BTS 2.
Après l'application de cette couleur j'étais satisfait que le camouflage auquel
j'étais parvenu aille dans la bonne direction et bien qu’ayant un côté un peu
(plus) sauvage[1],
il manquait encore l’application des jus, les éclats de peinture et les effets
de rouille.
A ce stade, Mick Jordan, un maquettiste plus tourné vers les Panzers mais qui s’adonne de temps à autre au moderne, est apparu. Je lui montrai l’IMR et lui demandai de donner objectivement son avis. Un regard d'horreur stupéfait parut sur son visage, ses yeux s’ouvrirent alors qu’il regardait « la victime ». Après son commentaire sur le côté frappant de la couleur, je suggérai d’atténuer celle-ci. Mais en y réfléchissant, j’avais choisi ce schéma de camouflage unique et ne voulais pas en être détourné.
Je savais que je disposai d’une période plutôt courte pour terminer cet IMR avant qu’il ne rejoigne sinon pour longtemps les étagères de mes modèles inachevés.
Après avoir
relu les articles d’Adam Wilder sur le tracto-chargeur de l'OTAN et le
Panther F plus récent, et étudié,
entre autres, ses effets d'usure à l’éponge et son style d'éclats de peinture,
je
décidai de tenter le tout pour le tout.
J’atténuai le gris pâle en appliquant un jus à l’huile jaune cadmium,
puis une fois sec, j'appliquai à
nouveau du gris pâle d’origine en plusieurs taches en les tapotant avec du
papier mouchoir pour adoucir l'effet. Ceci créa l'impression que certaines zones
étaient moins altérées que d’autres.
Sur la partie supérieure de la flèche, j'ai décidé de recréer l’effet de rouille et d'usure que vous pourriez trouver dans cette zone négligée sur vieux véhicule. C'est ce que je fis avec du noir, du brun rouge et de l’orange Humbrol. Quand ce fut sec, je couvris la zone avec un mélange de pigments rouge orangé et jaune.
L'étape suivante fut la peinture de l'équipage et des soldats. Ces quatre types étaient en eux-mêmes un projet commun où Paul Marshall et moi-même bricolions avec les figurines de manière à parvenir à un ensemble d’aspect assez usé et fatigué pour s’intégrer à l'IMR.
Finalement j'ai pris la base que Dave avait construite, qui est à mon avis l'une de ses plus belles à ce jour, mis le véhicule en position, créé un monticule de gravats approprié pour l'avant de la lame à partir de schistes de l’entrée de mon garage et de dépôts de calcaire d'une vieille bouilloire.
Conclusion
Bien que ce projet en scratch ait pris un certain nombre de mois pour être terminé et ait été un peu plus exigeant que d'habitude, j'ai trouvé que l'aspect le plus stimulant et enrichissant a été la modification du schéma de camouflage de la onzième heure.
Le projet m'avait vu m'aventurer sur un terrain nouveau et j’ai eu le sentiment que le véhicule portant l'un des camouflages les plus récents apparus sur les blindés russes au cours de la dernière décennie avec ses quelques décalques Skif recréait une impression très réelle de ce véhicule blindé du génie en service depuis longtemps.
Mes remerciements doivent aller vers David Coyne, Paul Marshall, Mick Jourdain, Herr Kunkles et surtout celle qui doit être respectée[2] pour me permettre de passer de nombreuses heures à la recherche du plaisir dans le plastique.
[1]
Jeu de mots sur le nom d’Adam Wilder, wild signifiant sauvage.
[2]
Swmbo : she who must be obeyed en anglais
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Références:
Baryatinsky. M (1999) Tanks in Chechyna . ISBN 5-93574-001-X
RAIDS special 'TCHETCHENIE' , Histoire & Collections, Paris
http://www.armyrecognition.com